Découvrez les dernières analyses de la jurisprudence de Maître Pierre NOUAL pour l'AJCT (Lefebvre - Dalloz).
La cour administrative d’appel de Nancy rappelle que parmi les différents intérêts protégés par l’article L. 511-1 du code de l’environnement, auquel sont soumises les autorisations de créer et d’exploiter des parcs éoliens, figure « la conservation des sites et des monuments ». Aussi, la visibilité du projet depuis un monument historique inscrit dans un paysage implique de refuser le refus d’éolienne (Cour administrative d’appel de Nancy, 11 avril 2024, n° 21NC00030 et n° 21NC00037, Sté Énergie du Dôme Haut-Saônois 1 et Sté Énergie du Dôme Haut-Saônois 2 c/ Préfet de la Haute-Saône).
Située sur la colline de Bourlémont, la chapelle Notre-Dame du Haut domine la petite ville de Ronchamp (Haute-Saône). Sanctuaire marial très ancien, l’édifice a connu diverses transformations, jusqu’à son importante dégradation lors de la Seconde Guerre mondiale, avant qu’il ne soit décidé une reconstruction sur les plans de l’architecte Le Corbusier dans les années 1950. Ce dernier, en faisant une réponse architecturale au paysage environnement, a édifié l’une des plus grandes icônes du renouveau de l’art sacré, véritable symbole du mouvement moderne de l’architecture du XXe siècle (v. not., M.-A. Crippa et F. Caussé, Le Corbusier, Ronchamp, Hazan, 2014). Pour autant, à une douzaine de kilomètres de ce site, deux sociétés ont sollicité, en 2017 et 2019, deux autorisations environnementales afin d’implanter deux parcs éoliens, pour un total de 9 éoliennes et 3 postes de livraison.
Or, les éoliennes ont mauvaise presse, notamment auprès des défenseurs du patrimoine qui les accusent de dévaster les paysages français, alors qu’elles sont devenues un sujet de société face au réchauffement climatique (v. not., C. Philibert, Éoliennes, pourquoi tant de haine ?, Les Petits matins, 2023). Toutefois, leur installation doit se faire dans le respect des monuments historiques et des sites patrimoniaux. De fait, par deux arrêtés du 4 novembre 2020, le préfet de la Haute-Saône a refusé de délivrer ces autorisations. Mécontentes de cette issue administrative, les sociétés ont alors saisi la cour administrative d’appel de Nancy (sur la question de la compétence, voir le rappel pratique).
Par principe, les installations classées pour la protection de l’environnement doivent faire l’objet d’une autorisation environnementale délivrée par le préfet parce qu’elles peuvent présenter des dangers (incendies, explosions, pollutions, etc.) ou des inconvénients pour la protection de la nature, de l’environnement et des paysages ou la conservation des sites et des monuments, ainsi que des éléments du patrimoine archéologique (C. urb., art. R. 111-27). Le juristes sait que pour rechercher l’existence d’une atteinte à un site ou un monument, il faut apprécier la qualité du site d’implantation de la construction du projet éolien puis d’évaluer son impact, bien qu’il soit exclu de procéder à une balance des intérêts divers en présence autres que ceux visés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement, à l’image de « la protection de la nature, de l’environnement et des paysages » pour les installations classées pour la protection de l’environnement (v. not., M. Heinis, Le contentieux de l’impact visuel des éoliennes dans la jurisprudence du Conseil d’État, AJDA 2022. 2517 ; M. Baubonne, Énergies renouvelables et protection du paysage : un fragile équilibre, RFDA 2023. 931). Ceci explique qu’il soit possible de refuser une autorisation environnementale au titre de la préservation de sites dépourvus de toute caractéristique physique remarquable mais relevant de « lieux de mémoires » (CE, 24 juill. 2019, n° 421143, Assoc. de protection du site des Petites-Dalles, inédit ; CAA Douai, 2 avr. 2020, n° 18DA01065, Sté Parc éolien des trois communes, inédit) ou encore de la dimension immatérielle d’un paysage au-delà des caractéristiques strictement physiques (CE, 4 oct. 2023, n° 464855, Sté Combray Énergie : Lebon T. ; AJDA 2023. 1808 ; Juristourisme 2023, no 268, p. 11, obs. C. Devès ; RFDA 2023. 1073, note J.-P. Camby et J.-E. Schoettl ; AJCT 2024. 116, obs. P. Noual). Cela signifie que pour statuer sur une demande d’autorisation environnementale, l’autorité administrative doit s’assurer que le projet ne méconnaît pas l’exigence de protection des paysages et de conservation des sites et monuments et ne porte pas atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants. Il revenait alors aux magistrats d’appel d’apprécier le projet en cause.[...].
Pour découvrir le commentaire de Maître Pierre Noual en intégralité, rendez-vous sur https://www.dalloz-revues.fr/.
*
Dans le cadre de son activité dédiée au patrimoine culturel et artistique, Pierre Noual - Avocat répond à vos interrogations et vous accompagne : contactez-nous !